Cette carte répertorie les personnes mortes en Belgique au cours ou à la suite d’une opération policière (interpellation, arrestation, course-poursuite, etc.), selon les zones de police impliquées. Il s’agit ici des conséquences de cet acte, à savoir le décès brutal d’une personne qui ne serait pas morte s’il n’y avait pas eu d’intervention policière.
Une zone de police est placée sous la supervision d’un Chef de Corps. Ce dernier travaille sous l’autorité du Bourgmestre dans le cas d’une zone mono-communale ou sous l’autorité d’un collège de police dans le cas d’une zone pluri-communales.
Nous sommes remontés à Semira Adamu, la première victime dont la mort (en 1998) a été filmée en Belgique, et dont le retentissement médiatique a entraîné la démission du ministre de l’Intérieur, Louis Tobback, et un changement législatif avec l’interdiction de l’utilisation de la « technique du coussin » lors des expulsions. Malheureusement, avant elle, de nombreuses personnes sont également décédées à la suite de violences policières1. Cette liste a été établie en mai 2023, et si elle tend à être exhaustive, elle ne l’est certainement pas : « souvent les difficultés d’accès à la justice, à la possibilité de se constituer partie civile, la précarité et la peur des représailles empêchent que soient élucidées les conditions de la surmortalité des personnes non blanche en Belgique par l’intermédiaire de procès publics, particulièrement lorsqu’elles sont sans-papiers2 ». De plus, les données concernant la Flandre sont probablement incomplètes. Face à ces manques, nous prions les familles de victimes qui n’y trouveraient pas leur proche de bien vouloir nous excuser.
Nous avons décidé de préciser « l’origine ethnique3 » des personnes, malgré l’ambiguïté de ce terme, car cela permet de pouvoir observer des biais racistes à l’œuvre dans le comportement des policier.es : ainsi, plus de 90% des victimes sont des personnes non blanches.
Dans environ la moitié des situations, des caméras étaient présentes sur les lieux (essentiellement des caméras de surveillance, parfois des téléphones portables), et un certain nombre de ces vidéos ont été saisies et versées aux dossiers d’instruction.
Dans le cas des affaires encore à l’instruction au moment de la publication de cette liste, nous ne pouvons pas communiquer la manière dont les images ont été instruites ou ce qu’elles révèlent. Nous ne relayons alors que ce qui a été communiqué dans la presse, par le parquet ou les avocats et membres des familles. Parfois, la présence de caméras n’a pas été communiquée.
(L’élaboration de cette liste s’est appuyée sur un dépouillement de coupures de presse, un travail de terrain et les recoupements des recensements d’ObsPol, de Bruxelles Panthères, de Getting the Voice Out et de Cécile Guypen. Ce travail de cartographie mené par Théodora Jacobs et Maud Girault s’inspire de celui de Boabab Van de Teranga qui a travaillé sur la zone de Bruxelles capitale.)
1 Voir ce recensement consacré à la période 1971-1993 « De Mohammed Soussi à Saïd Charki, 25 ans de terreurs policières » , mais qui est aussi très probablement incomplet.
2 « L’assassinat de Nahel comme révélateur des violences policières en Belgique article » , 7 juillet 2023. Cet article évoque de 65 à 94 personnes mortes entre les mains de la police depuis 2018.
3 On entend par « origine ethnique », qu’elle soit réelle ou supposée, un ensemble de caractéristiques qui peuvent relier la personne à une zone géographique : nationalité, parcours migratoire (de la personne ou de ses ascendants), couleur de peau, nom, etc.